Région parisienne - France

Eric Patrizio

Le Rapport Campbell : Nutrition et santé

J’ai entendu parler du « Rapport Campbell » comme étant l’ouvrage de référence internationale, de loin le plus exhaustif, à propos de nutrition. Rien que ça ! Je me suis donc empressé de me procurer ce livre, non sans difficulté dans la mesure où la version française est épuisée. Et, dès les premières lignes, j’ai été happé tant les révélations sont stupéfiantes. D’autant que le phrasé est accessible, compréhensible de tous, malgré un sujet purement scientifique, parfois pointu.

Impossible de résumer tout le rapport eu égard à la densité du travail effectué par l’auteur, fruit de plus de 35 années de recherches scientifiques à travers plusieurs milliers d’expériences complétées de publications connexes. C’est pourquoi, je m’apprête à vous livrer ma petite synthèse, non technique, en mettant en lumière les thèmes qui m’ont touché.

Commençons par l’auteur : Monsieur Colin Campbell, né en 1934, est professeur de biochimie nutritionnelle à l’Université de Cornell située dans l’État de New York (USA).

Son rapport est la résultante d’une vie de travaux de recherches effectués notamment avec la collaboration de la célèbre université britannique d’Oxford, et de l’Académie Chinoise de Médecine Préventive. Il a été publié en 2005, rédigé avec le concours de son fils qui l’a beaucoup encouragé dans cette démarche.

Origines de l’étude : Le professeur Campbell a été élevé dans une ferme américaine. A tous les repas, il mangeait de la viande et buvait du lait. Au début de sa carrière, il s’est intéressé à un sondage d’envergure, à l’échelle d’un vaste pays, la Chine, effectué dans les années 1970, qui visait le taux de décès de différents cancers. Les résultats montraient des disparités incroyables entre les régions, mettant en lumière un lien indéniable entre les taux de cancers élevés et les régimes alimentaires à base de protéines animales. Malgré une réticence initiale naturelle en raison de son éducation, ce sondage, regroupant pour la première fois beaucoup de données lui donnant une crédibilité significative, constituera l’essence de son travail : The China Study, nom original de l’ouvrage.

Synthèse : Tous les travaux scientifiques menés par l’équipe du professeur Campbell convergent vers un seul et même point : une corrélation entre les régimes alimentaires à forte teneur en protéines d’origines animales avec l’ensemble des maladies dites de la « prospérité », à savoir l’obésité, les maladies cardio-vasculaires, le diabète, les maladies auto-immunes et, le meilleur pour la fin, les cancers. Autrement dit, adopter un régime alimentaire quasi végétarien, c’est-à-dire essentiellement basé sur des aliments complets, riches en fibres, en limitant les protéines animales, notamment le lait de vache et sa caséine, prévient les maladies de la prospérité !

Le chapitre 11 énonce huit principes sur l’alimentation et la santé. Voici les principes qui ont particulièrement retenu mon attention :

  • Ne pas isoler les nutriments, le tout étant toujours plus grand que la somme des parties. L’idée est qu’il est préférable d’ingérer les nutriments et les vitamines au sein d’aliments naturels et complets dans la mesure où seul le processus de digestion créera le mélange subtil capable de nous apporter tous les bienfaits nécessaire à notre santé. Dans ce contexte, nous voyons bien les limites des régimes, compléments alimentaires et autres compléments vitaminiques.
  • Il n’existe aucun aliment d’origine végétale qui ne fournisse pas les mêmes nutriments que ceux fournis par les aliments d’origine animale.
  • L’alimentation active, ou pas, les gènes favorisant certaines maladies. C’est certainement, LE principe essentiel à retenir !
  • L’alimentation prévient les maladies. L’alimentation, ralentie, inverse, voire même arrête certaines maladies déjà diagnostiquées.
  • Une bonne alimentation favorise une bonne santé générale mentale et physique dans la mesure où tout est interconnecté dans la vie.

Enfin, l’auteur aborde le sujet au combien sensible des lobbies. Le marketing alimentaire, orchestré par l’industrie agroalimentaire, encourage une forte consommation de viande et de lait de vache, dès le plus jeune âge, pour bien se développer, devenir grand, fort et en bonne santé. Plus récemment, le marketing s’est emparé du bien-être avec le sport, l’activité, le dynamisme, la jeunesse « éternelle ». Les compléments alimentaires sont là pour nous aider. Malgré cela, le nombre d’obèses augmente sans cesse, accompagné de tous les effets secondaires que sont l’hypertension, le cholestérol ou le diabète. L’industrie pharmaceutique se frotte les mains parce qu’une prise de médicaments, parfois à vie, permet de réguler ces dysfonctionnements. Ce cercle « vertueux », manifestement orchestré, est le Saint Graal de tout business qui se respecte. Ainsi, il est aisé de comprendre pourquoi le professeur Campbell a rencontré tant de difficultés durant toute sa carrière pour communiquer à propos de ses résultats de recherche dans la mesure où, par exemple, en l’espace d’à peine quelques mois, une alimentation végétarienne permet de diminuer la tension artérielle et le taux de cholestérol.

 

Vous comprenez maintenant pourquoi j’ai dévoré le rapport Campbell, au point de vouloir devenir végétarien du jour au lendemain. Néanmoins, après avoir digéré, c’est le cas de le dire, ce flot d’informations, j’ai nuancé ma première analyse.

Tout d’abord, et c’est clairement précisé dans le livre, il s’agit d’une étude américaine. Nos habitudes alimentaires françaises, pays de la gastronomie par excellence, sont différentes. Ainsi, grâce à notre éducation culinaire, pas la peine de tout remettre en question. Mais n’oublions pas que nos grandes surfaces sont aussi remplies de « malbouffe » et que les maladies chroniques de la prospérité progressent également ici. Conservons ce patrimoine et continuons à éduquer nos enfants dans ce sens.

D’autre part, nous vivons actuellement une période foncièrement anxiogène : crise économique, insécurité, problèmes écologiques, etc. Dans un premier temps, la lecture du rapport Campbell est venue alimenter cette anxiété chez moi. En effet, malgré une bonne hygiène de vie assurée par mon éducation franco-italienne, je ne compte plus, comme tout un chacun, les soirées foot pizzas, les fast food avec les copains, ou les plats préparés au boulot pour déjeuner rapidement. Ne suis-je pas en train de détériorer ma santé à petit feu ?

Ceci dit, les années passant, j’ai constaté un phénomène très intéressant. Dans mon entourage, toutes les personnes ayant traversé une période de réflexion existentielle, c’est également mon cas, ont naturellement modifié leurs habitudes alimentaires et leur mode de vie. Dans les grandes lignes, cela se traduit de la manière suivante :

  • Être plus vigilent sur la qualité de son sommeil,
  • Pratiquer une activité physique régulière,
  • Diminuer, voire arrêter, la consommation de tabac et d’alcool,
  • Modifier ses habitudes alimentaires : diminution des quantités et augmentation de la qualité, à savoir plus de fruits et légumes et moins de viandes. Nous y voilà !

Mais pourquoi ce questionnement existentiel engendrerait-il ce changement de paradigme au niveau du rythme de vie ? En ce qui me concerne, cette phase s’est accompagnée dans un premier temps d’un recentrage sur mon corps puis, dans un second temps, d’une prise de conscience de l’importance de la nature. Et le dénominateur commun entre le corps et la nature est le ressenti de l’énergie. CQFD. Manger sainement, conserver une activité physique et bien dormir permet d’harmoniser ses énergies, ce qui constitue un bien-être tout à fait appréciable, essentiel pour bien mener sa vie. Sans oublier qu’il ne faut surtout pas s’interdire de sortir des sentiers battus de temps en temps, essentiel également pour bien mener sa vie ! C’est-à-dire que le rapport Campbell démontrerait scientifiquement ce que notre corps est capable de nous dire, encore faut-il savoir l’entendre. Matthieu Ricard, en allant méditer sous contrôle dans des hôpitaux, a bien compris ce besoin de démonstration de notre société occidentale rationnelle.

 

En guise de conclusion, je me souviens d’une anecdote racontée par un ami revenant d’un séjour au ski. Il me disait qu’en tant qu’épicurien, il s’était fait plaisir culinairement parlant pendant ses vacances alpines au point d’avoir vomit en sortant d’un restaurant en raison d’un trop plein de raclette. Le corps est parfois obligé de hurler pour être entendu et Épicure doit se retourner dans sa tombe, tant il prônait l’harmonie dans les plaisirs de la vie.

Notre société encourage les comportements excessifs, comme celui exposé précédemment, pour soit disant être un bon vivant, profiter de la vie et être un bon convive en société, non ennuyeux. Je suis en total désaccord avec ce principe. Au contraire, prévenir sa santé, vivre en conscience, permet de jouir de beaucoup d’énergie pendant une longue période.

Adopter un rythme de vie sain ne permet pas de vivre plus longtemps, car nul ne sait prédire le futur. En revanche, il permet de vivre mieux en profitant pleinement de ses capacités physiques et intellectuelles.

Le Rapport Campbell : Etude internationale sur la nutrition

Couverture du livre « Le Rapport Campbell » : Étude internationale sur la nutrition

1 Commentaire

  1. Eric Patrizio (Auteur de l'article)

    Le documentaire « Demain » de Cyril Dion et Mélanie Laurent, sorti fin 2015, aborde notamment la question de l’alimentation. Au premier plan, il n’est pas question de santé, mais plutôt d’écologie : Comment nourrir une population grandissante tout en tenant compte de l’environnement ? L’industrie agroalimentaire, dont les lobbies et le marketing nous font croire que seule une agriculture de masse automatisée peut répondre à ce besoin sociétal, consomme en fait énormément d’énergies fossiles, appauvrie les sols via les monocultures et jouit de rendements étonnamment très faibles ! La clef, revenir aux fondamentaux : une alimentation essentiellement végétale, cultivée dans des champs plus riches, donc à plus hauts rendements, apportant alors une meilleure qualité, via des circuits économiques locaux. La messe est dite, d’autant que l’industrie bovine et laitière serait en pôle position de la consommation de pétrole !
    http://blog.mpns.fr/2016/03/demain-le-film/

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