-
Les enfants, préparez-vous, on va sortir prendre l’air.
S’aérer sera certainement salvateur suite à un excellent déjeuner dominical entre amis qui n’a cessé de s’éterniser. Le plaisir de la convivialité, des bonnes choses et des petits excès. Mais alors que la sieste semblait s’imposer pour certains, la jeunesse a quant à elle eu un regain d’énergie, comme toujours.
Ça y est, les fauves sont lâchés !
-
Au fait Nico, on n’a pas eu l’occasion d’en parler pendant le repas, ça continue à bien se passer ton boulot ?
-
Oui, très bien, on s’est super bien structuré. On a maintenant de très gros clients en Asie, je vais d’ailleurs à Shanghai plusieurs fois par an.
-
Top, quelle chance de pouvoir voyager dans le cadre de ton activité professionnelle, un bon moyen de découvrir le monde.
-
Oui, c’est vrai, difficile de se plaindre par les temps qui courent, même si c’est un peu fatiguant et stressant. Je suis d’ailleurs très bien rémunéré pour ça. En revanche, pour être totalement honnête avec toi, c’est moi qui ne vais pas très bien …
-
Ah bon ? Je ne comprends pas bien, c’est à dire ?!
-
J’ai pris conscience que ce job ne m’intéresse absolument pas ! Je passe mes journées, longues, très longues, à préparer des présentations, assister à des réunions à rallonge, rédiger des comptes rendus, courir dans les transports, etc. Les mathématiques, ma passion, notamment la théorie des jeux, sont très loin. Le voici l’envers du décor du métier de « consultant en stratégies d’entreprises ». Il n’y a aucun sens à faire cela au quotidien, cela ne m’apporte rien, et j’ai même l’impression que cela apporte parfois de la souffrance aux salariés des sociétés que nous conseillons. Je suis totalement perdu en ce moment, je ne sais plus du tout quoi faire. Changer de métier ? Why not, mais quoi ?
-
Quelle a été l’origine de cette réflexion ?
-
Et bien figure toi qu’on est déjà sur le point de finir de rembourser notre crédit immobilier. Ma large rémunération n’étant plus nécessaire, pourquoi donc continuer ainsi ? L’argent n’est plus au centre de mes choix professionnels. Mais quels choix s’offrent à moi ? Je n’en sais fichtre rien, tu vois le bug !
-
MMMmmm, je vois. Et Isabelle, elle te dit quoi ? Vous avez commencé à échanger à propos de ce sujet « existentiel » ?
-
Existentiel, tu m’étonnes 🙁 Je dirais qu’on est mal barré ! En effet, elle ne l’a pas encore trop crié sur les toits, elle bosse maintenant uniquement à mi-temps car elle vient de commencer une école d’art. Moralité, on est dans la même galère, c’est la remise en question permanente. J’ai l’impression qu’on est en train de casser toutes les fondations qu’on a construites depuis qu’on s’est rencontré. Et nos enfants dans tout ça, si on part en live, tu vois le tableau !?
-
Même galère, je dirais plutôt, même bateau qui navigue vers de nouveaux horizons inconnus mais certainement plus lumineux. C’est le côté inconnu qui est angoissant car rejeté par notre société, alors qu’il est créateur … A moi d’être honnête, j’ai traversé en toute discrétion une crise existentielle il y a quelques années. Ma « crise de la quarantaine » à moi dans toute sa splendeur 🙂 C’est long, c’est dur, très dur parfois, cela demande beaucoup de persévérance pour passer le cap, mais c’est pour la bonne cause.
-
Ah ouais !? Mais que t’est-il arrivé ? Personne n’était au courant dans le groupe. Tu as géré comment ? Ça m’intéresse !
La meute juvénile revient vers nous au pas de course, en toute discrétion comme à son habitude …
-
Papa, papa, tu viens jouer au foot avec nous ? Aller, aller, dis oui, dis oui … !!
-
Bon Nico, je te propose qu’on reparle de tout ça à un moment plus opportun. La seule chose que je puisse te dire c’est que j’ai été accompagné dans cette démarche par un psychothérapeute. L’aide d’un guide s’est avéré être déterminante. Et au passage, vos enfants vous remercieront d’avoir su affronter cette crise.
La crise de la quarantaine, cette prise de conscience que la moitié du chemin a été parcourue, l’heure des premiers bilans, de la soit disant fin de la « jeunesse ». Carl Gustav Jung nous enseigne que nous consacrons la première moitié de notre existence à construire notre Moi. C’est-à-dire notre éducation, notre activité professionnelle, notre sécurité matérielle, notre propre famille. Et ensuite, le Soi débarque tout droit de notre inconscient sans crier garde : Et si on donnait du sens à notre vie, quelle est notre mission profonde, qu’est ce qui nous anime ? Et la vie intérieure dans tout ça ? L’éveil de la spiritualité, le gros mot est lâché …
C’est très souvent un événement soudain qui déclenche ce processus. C’est intense, inattendu, cela peut faire peur tant ce n’est pas valorisé dans notre culture. En ce qui concerne mon ami Nicolas, le terme de son crédit immobilier lui a ouvert les yeux et, du coup, lui permet d’élargir son spectre de possibilités de vie. Une forme de liberté retrouvée pour reprendre la thématique développée dans mon article précédent. A ce stade, c’est souvent le vide, voire la dépression, mais c’est surtout le début du plus beau des voyages : le voyage intérieur … Objectif : La connaissance de Soi, vaste programme !